Tristan Knoertzer est ce que vous attendez d’un guide de Chamonix. Il a l’esprit de la montagne qui coule dans ses veines et est la deuxième génération de guides dans sa famille.
S’il est né et a grandi à Chamonix, temple de l’alpinisme et de la haute montagne, sa vision dépasse nos frontières.
Il rêve de perpétuer la tradition de guide et de la Compagnie des Guides ainsi que de repousser les limites à l’étranger.
Un champion accompli, un guide dynamique et une trajectoire inspirante.
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Tristan Knoertzer, tel père, tel fils… ou pas
Peux-tu nous parler brièvement de ton parcours ?
Je suis né à Chamonix, mais ma famille n’était pas originaire d’ici. Ils ont déménagé juste avant ma naissance. Ma mère était journaliste puis s’est tournée vers l’immobilier. Mon père était guide de montagne, mais je n’ai pas grandi avec lui.
A Chamonix, père guide, tu étais destiné à être guide ?
Bon, au début, j’aimais être à la montagne, mais je ne voulais vraiment pas être guide. Je pense que je trouvais que c’était un peu trop lent pour moi. Peut-être que je pensais que ce n’était pas aussi intense que je le souhaitais/pensais que ce travail pouvait l’être.
Alors qu’est-ce que tu aimais quand tu étais plus jeune ?
J’adorais l’escalade et le judo. Le judo est vite devenu difficile pour moi. Le sport est très exigeant en termes de contrôle du poids. À l’adolescence, j’étais entre deux groupes de poids différents. Cela signifiait que je devais soit perdre du poids, soit en prendre beaucoup pour être compétitif.
Grâce à cela, je me suis lancée à toute vitesse dans l’escalade et je suis devenue champion national !
Grandir avec les montagnes
Comment/quand es-tu passé à l’alpinisme ?
Parce que j’ai grandi à Chamonix, j’ai toujours « été baigné » dans l’alpinisme. Cela dit, c’est vraiment au cours de mon internat que j’ai développé mes compétences et mon amour de la montagne qui m’ont amené à guider.
A l’internat, tu étudies la semaine, et quand tu rentres chez toi le week-end, tu es complètement libre. A cause de cet emploi du temps, j’avais beaucoup de temps, chaque semaine, chaque week-end pour aller à la montagne. Comme ce n’était pas vraiment la même chose pour les autres personnes de mon âge, je sortais avec des personnes plus âgées que moi.
Cela m’a aidé à devenir mature beaucoup plus rapidement, et cela m’a permis d’apprendre extrêmement vite. Cela m’a en quelque sorte façonné pour devenir le guide que je suis aujourd’hui.
Tu es devenu guide de Chamonix juste après le lycée ?
Juste après le lycée, je suis allé au Pérou pour une sorte d’expédition, avec des gens beaucoup plus âgés que moi (dont certains qui se préparaient à devenir guides). C’était toute une mission pour moi car je devais planifier toute une expédition avec seulement 1 000 € en poche !
Après le lycée, je suis allé étudier le droit. Parallèlement, j’ai réussi l’examen pour devenir moniteur de ski. Puis j’ai réalisé que j’avais coché toutes les différentes courses qu’il fallait pour postuler pour devenir guide à Chamonix. A l’époque, mon père m’avait dit qu’il serait heureux de m’aider à financer ma formation de guide, mais il fallait d’abord que j’obtienne un Master.
J’ai fait une école de commerce à Grenoble et je suis devenu guide par la suite.
Es-tu beaucoup parti à l’étranger en plus de ton expédition au Pérou ?
Oui, j’ai adhéré à la FFME (Fédération Française d’Escalade et d’Alpinisme) pendant 3 ans. C’était super ! J’ai eu la chance d’aller aux USA, au Maroc…
Après un voyage de vacances aux Philippines, j’ai décidé de monter un projet, le projet borderline, pour venir en aide à une association qui soutient les jeunes filles victimes d’abus sexuels. Le projet borderline ne m’a pas trop éloigné de Chamonix. C’était une boucle de 300 km en France, en Suisse et en Italie sans utiliser de véhicule motorisé.
Ton métier de guide chamoniard te prend 100% de ton temps ?
Non, je dirais que c’est 60% de pilotage et 40% de gestion de projet. Je travaille également avec la Compagnie des Guides pour préparer la fête des 200 ans. Quoi qu’il en soit, je pense vraiment qu’être accompagnateur en montagne est un métier extraordinaire quand on peut choisir quand on peut sortir. Si tu es obligé de sortir, d’aller avec des clients 100% de ton temps, c’est là que ça devient plus dangereux, et ça ressemble plus à une prison.
Tu n’es pas vieux mais vois-tu une sorte d’évolution du rôle/du métier de guide ?
Ça c’est sûr ! Le métier évolue beaucoup avec les différents impacts du changement climatique. Beaucoup de courses ne sont plus vraiment possibles. En raison de la fonte du pergélisol, de nombreux itinéraires traditionnels sont désormais trop dangereux à cause des chutes de pierres. D’autres ne sont réalisables que pendant une fenêtre serrée chaque année.
Le travail est corrélé à la nature et au changement climatique. C’est en constante évolution. Quand la nature change, nous, en tant que guide, devons changer notre approche, notre façon de lire la montagne etc…
Qu’est-ce qu’il t’attend dans le futur ?
Quels sont tes projets actuels ?
J’essaye de construire ma maison ! Je pense que j’ai des compétences en montagne, mais je ne suis vraiment pas doué avec un marteau.
Plus sérieusement, je suis en charge de l’organisation de la fête des 200 ans de la Compagnie des Guides, qui aura lieu l’année prochaine. Pas très facile avec le covid, mais j’organise différents événements pour l’occasion.
Quelque chose à l’étranger ?
J’ai la chance d’avoir une clientèle assez internationale. J’organise actuellement, avec mon père, une expédition pour gravir un sommet dans la région du Manaslu pour l’automne prochain. C’est au Népal et fera plus de 7 000 mètres.
Ce sera avec un groupe de clients français et anglais.